Don't let me down / PV Jude

mmIl fait froid... Mes lèvres sont gercées, la peau de mon visage me tiraille, surtout au niveau du front. J'aurais du mettre une écharpe...
mmJe me suis réveillé tard ce matin, c'est mon jour de repos aujourd'hui, autant en profiter pour faire la grasse matinée. Et puis ça m'a fait du bien une nuit complète de sommeil, sans avoir à me dire : ah, faudrait peut-être que je me lève là, on m'attend. Non, au lieu de ça, je me suis tourné de l'autre côté et je me suis rendormit. J'ai rêvé d'Enrico. Ça faisait un moment que ça ne m'étais pas arrivé... Je crois qu'il me manque. Un peu...
mmY'a un avion qui passe au dessus de ma tête. Au bruit c'est un A380... En tout cas c'est pas un Boeing, ça c'est sûr... Faut que j'économise. La prochaine fois que je vais à Philadelphie, je veux y aller en avion. Le bus c'est vraiment chiant... Et puis c'est long, c'est bruyant, y'a pas moyen de penser en paix... J'ai dis à mes amis que je passerais peut-être au terrian de basket, mais franchement là, j'ai pas envie... J'ai vraiment trop froid... Même si, si je joue, la température de mon corps augmentera. Non, j'ai vraiment pas envie d'aller jouer au basket aujourd'hui... Je suis encore fatigué. Mal réveillé... Je préfère me balader. Peut-être que je trouverais un endroit sympa. Je ne connais pas du tout cette partie là du Bronx...

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mmDream', c'est comme cela que l'appelait ses amis. Parce qu'il est toujours dans la lune. Il faut parfois le secouer pour qu'il redescende sur Terre, une main agitée sous son nez ne fait jamais effet... En ce moment même, il marche à travers le Bronx, son regard violet s'attarde sur de petites choses. Il fait d'une file de fourmi un rail de chemin de fer d'où une locomotive étincelante laisse échapper sa blanche vapeur, claironnante au fin fond de l'esprit de Chogan.
mmMais, bien vite, ses pieds quittent le bitume, quittent l'asphalte grise et poussiéreuse. Face à lui, il y a un terrain vague. Non loin, on voit le grand chapiteau du Laudanum Circus. Mais, pour l'instant, c'est le terrain vague jonché d'une multitudes d'objet et de vieux prospectus que foulent les pieds de Chogan.
mmLe géant finit par arrêter de marcher. L'instant d'après, il s'était allongé au sol, oubliant le froid, oubliant les détritus entremêlés dans les hautes herbes. De sa haute stature, on en voit plus que ses coudes : il a croisé ses mains derrière sa tête et ramener ses bras vers son visage pour le projeter du vent qui souffle en rase motte. Il regarde le ciel.

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mmComme le ciel est beau en hiver... Les nuages sont si blancs, le ciel est si bleu... Les oiseaux commencent à partir vers le sud. Il serait temps... La neige devrait tomber d'ici quelques jours... Et la Nouvelle Big Apple se transformera en château de glace avec ses tourelles et ses donjons. J
mmJ'aurais bien aimé voir la vraie New York. Celle de l'Empire State Building et King Kong. Et les Twin Tower aussi. Les illuminations de Nöel entrelacées dans les arbres de Central Park. Le patin à glace sur le lac gelé. Les marchands de marron chaud... Et puis, les petites boutiques en rondin de bois, du marché de Noël, les crèpes au chocolat, les batailles de boules de neige entre les gamins et la fureur des adultes lorsqu'ils s'en reçoivent une en pleine face... Et le rire des enfants...
mmOuai, le rire de enfants...

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mmChogan ferme les yeux. Il entend soudainement le rire de ces enfants et a l'impression que l'odeur des marrons chauds est en train de l'envelopper. Il vaudrait mieux qu'il se relève et rentre chez lui avant de s'endormir et de tomber en hypothermie.

Invité

L’idée première du commun des mortels est que, bosser dans un cirque de monstres, ça doit pas être de tout repos. Et effectivement ça ne l’est pas. Ensuite, ils vous diront que ça doit être effrayant. Il est vrai que l’on fréquente des erreurs de la nature, des êtres difformes et parfois franchement givrés, mais ce n’est pas flippant. Ils ne sont que la démonstration de ce qui se cache en chacun de vous. Prenons Malachite par exemple. Ce mec est complètement cramé de cerveau, et j’ai pas fait exprès de prendre cette expression, mais ça tombe bien. Il est du genre à faire des coups de pute, à ne jurer qu’après un seul maître, et quand il a un maître, il devient aussi fidèle et aimant (à sa façon) qu’un chien. Comme une femme amoureuse, non ? Il a son côté masochiste aussi, il joue avec le feu et les explosifs sans craindre de se bruler ou même de se tuer, et pour cause, le mot peur est un concept pour lui. Alors il en a fait son boulot. Comme un enfant qui joue avec des couteaux parce qu’il veut faire la cuisine, non ? Prenons maintenant le directeur du cirque. Avant d’être patron, il est d’abord employé, l’homme le plus fort du monde. C’est vrai que ça fait grandiloquent, mais il n’usurpe pas son titre, loin de là. Il ressemble à un taureau, il hurle et cogne dans tous les sens, mais c’est la seule façon pour lui de manifester son autorité. Comme un président, non ? Il a des idées bizarres, il est franchement sadique sur les bords, il se mutile, mutile les autres, se scarifie, scarifie les autres, mais après tout, c’est comme si c’était un ado, non ?

Concluons donc que les habitants de Laudanum Circus sont des gens normaux.

Et comme toute personne normale, Jude, dont on vient de parler, a ses coups de ras le bol. Il n’a pas le temps de s’ennuyer pas au cirque, il est tout le temps à courir à droite à gauche pour garder la forme, mais bon, principalement pour gérer les conflits, c'est vrai. Et les formalités administratives, aussi. Sauf qu’aujourd’hui, le cirque était calme. La femme à barbe se maquillait, le cracheur de feu s’était enfermé quelque part pour bricoler ses bombes et l’homme serpent lustrait ses écailles. Rien de plus normal. Jude s’était donc retrouvé dans sa roulotte, à remplir des papiers sans fin, à tirer la langue quand il devait signer et à grogner quand il trouvait des fautes de calcul. N’étant pas un homme de lettre, vive les euphémismes, il en avait eu très rapidement ras la casquette, et avait commencé à se dire qu’une journée sans hurlement c’était une journée de perdue. Bon il disait la même chose concernant les journées sans baise, mais là n’est pas le sujet. Il n’était donc pas quatorze heures qu’il avait laissé tomber son encre et sa plume, qu’il avait claqué sa porte et qu’il était parti faire un tour. Il avait rapidement visité son cirque, râlant un peu pour la forme, et s’était éloigné vers le terrain vague qui juxtaposait le chapiteau. Il avait marché en long et en large, sur une distance de trois mètres environ, jusqu’à ce que la boue collante garde la trace de ses pas. Il releva alors le nez, détailla l’horizon de ses yeux plissés et grogna une nouvelle fois en voyant un corps étalé par terre. Un cadavre sûrement. C’était pas la première fois que ça arrivait, les gens avaient tendance à se dire que c’était un terrain vague, alors quand on butait sa femme, son chien, sa grand-mère, son voisin, c’était un cimetière génial. Sauf que bon, les cadavres ça provoque des maladies, ça te nique l’eau en moins de deux, et ça éradique un cirque en un claquement de doigts. Pas le bon plan quoi.

Jude secoua la tête, un peu comme un chien qui s’ébroue, passablement énervé maintenant, et se dirigea droit vers l’intrus, ce sale cadavre puant et tout gonflé d’humidité, en voie de décomposition, et que je suis classe décidément. Bref ! Donc le truc, c’est qu’il s’apprêtait à mettre un grand coup de pied dedans, histoire de se venger de cette offense faite à l’intégrité de son cirque, sauf que c’était pas un cadavre. C’était un homme, le genre grand et fin, pas moche, mais tout autant intrus que l’était le mort. Jude se planta devant ledit homme, posa ses poings sur ses hanches et se racla la gorge pour attirer son attention.

« Faîtes quoi là ? C’pas un parc pour gamins ici. »

Il aurait pu rajouter « Port de casque obligatoire » que ça aurait paru naturel.

mmIl y a quelqu'un qui parle... C'est toi Enrico...? Non... Non ça n'est pas toi... Comment pourrait-ce être toi... Tu es mort et enterré. C'est même moi qui ai jeté la première poignée de terre. Moi qui ai laissé tombé la première rose. Rouge. Rouge comme le sang, rouge comme le soleil qui se couche, rouge comme ton coeur qui battait... Avant... Comme tu aimais cette couleur... Tu l'adorais ! Tu l'adulais...
mmJe me souviens encore très bien de ce bandana, rouge bien sûr, qui était toujours noué autour de ton poignet gauche. Dessous, il y avait ta montre. Ta veille montre dont tu avait honte mais dont tu ne pouvais pas te débarasser... Qu'est-ce que j'ai pu rire, la première fois que tu as enlevé ton bandana ! Oh oui, j'étais vraiment hilare devant cette petite montre, dont tu avais troqué le bracelet d'origine devenu trop petit contre un épais bracelet en cuir noir...
mmEn riant toi aussi, les joues rouges de honte, tu m'avais expliqué le temps que tu avais passé pour pouvoir monter un bracelet de cette taille sur un cadran aussi petit... Je l'ai toujours, tu sais, ce minuscule cadran jaune avec la tête de Mickey au centre, l'aiguille rouge pour les heures et l'aiguille bleue pour les minutes... Elles se sont arrêtées, ses aiguilles... Mais je l'ai gardée... J'aurais pu l'enterrer avec toi, te la laisser au poignet mais... J'avais envie, besoin de garder quelque chose de toi... Et cette montre, offerte par ta mère, pour ton dixième anniversaire, avant qu'elle ne meurt d'un cancer et que tu doive quitter Porto Rico, cette montre, était ce que tu avais de plus précieux au monde... Même si tu t'obstinais à la cacher sous ton bandana rouge, de honte... Tu l'as toujours gardée. Toujours.
mmPar contre, ton bandana, je te l'ai laissé. Je te l'ai noué autour de ton poignet, comme tu avais l'habitude de le faire. Je te l'ai laissé, mais j'ai gardé la montre. Peut-être ai-je été égoïste.. Mais je ne regrette pas. Au non, je ne regrette pas...
mmSi j'avais gardé le bandana, au bout que quelques temps, ton odeur aurait disparue du tissu. Alors que la montre... Mickey ne cesse de sourire tu sais. Il a toujours sa bouche grande ouverte et sa langue rouge. Et ses oreilles sont toujours aussi rondes et aussi grosses... Et quand je me concentre bien, c'est ton sourire que je vois à la place. C'est tout ton visage qui se dessine dans le minuscule cadrant aux aiguilles rouge et bleue... Je n'ai pas de photo de toi. Tu te cachais toujours le
visage lorsqu'un des copains faisait mine de te prendre en photo... J'ai n'ai que mes souvenirs. Les meilleurs comme les pires... C'est dur tu sais, de ce dire que tu n’es plus là...

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mmChogan souriait, toujours allongé dans l'herbe du terrain vague qui appartenait au Laudanum Circus. Mais ça, l'amérindien ne le savait pas et il avait doucement sombré dans le sommeil. Mais, on ne pouvait pas vraiment considérer cela comme une mini sieste, allongé dans l'herbe au milieu de déchets et autres immondices que l'homme jette sans regarder où ça atterrit. Non. Ca serait froisser Chogan de lui demander s'il dort alors qu'il est tout simplement en train de penser, un sourire au lèvres alors qu'un homme vient tout juste de se planter devant lui, le regard mauvais et les poings sur les hanches.
mmChogan l'a entendu. Bien sûr qu'il l'a entendu... Mais, il n'y a pas réellement prêté attention... Passant du coq à l'âne dans les méandres de sa pensée alambiquée. Il est comme ça Chogan... Si on l'appelle juste, il ne répond jamais. Il faut savoir... Capter son attention. Et surtout la garder.
mmEt pourtant, Chogan finit par ouvrir les yeux. Ses grandes iris violettes sortent de derrière leur fin voile de peau et fixe, mi-surprise mi-indifférentes l’homme face à elles. Le sourire qui s’était dessiné sur les lèvres de l’amérindien s’efface peu à peu. Chogan commence par se redresser, sans quitter les prunelles si claires de son vis-à-vis, il est assit dans l’herbe. Sans dire un mot, il se lève, face à l’étranger, il lui arrive au niveau des yeux, quel géant…

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mmQuel étrange homme… Plus grand que moi, c’est pourtant rare… Ses yeux sont d'un bleu, en tout cas ça y ressemble, presque transparents et agressifs, son expression faciale est menaçante et ses poings sur les hanches ne me disent rien qui vaille… Il a le torse aussi large qu’un poitrail de cheval, et je suis sûr que ses bras sont aussi épais qu’une porte de coffre fort... Pas envie de me battre moi… …Qu’est-ce qu’il a dis déjà … ? En tout cas, les tifs c'est pas trop ça... Mais qu'est-ce qu'il sont sale ! Je sais absolument pas ce qu'il a fait avec mais, je suis sûr que si j'en prend une mèche et que je la tire vers le haut, elle reste comme ça ...!
mmBref, il ressemble à un taureau à froncer les sourcils comme ça. Faudrait qu'il arrête pasqu'un jour, il va rester bloquer comme ça...

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mmChogan, Choga, Chogan... Ne sourit pas comme ça imbécile ! Tu veux qu'il te frappe ?!
mmMais c'est bel est bien un large sourire qui s'affiche sur les fines lèvres de l'amérindien alors que ses yeux violets sondent les clairs iris de l'étranger. Un sourire franc, lumineux.

Invité

Ce mec est suicidaire, c’est évident. Jude est allé réveiller le joyeux dormeur qui faisait sa sieste diurne dans un marécage putride et particulièrement dangereux, le tout à proximité d’une bande de cinglés, et il s’est gentiment retenu de le faire à coup de pied. Il a uniquement haussé le ton, posé une question purement rhétorique, et attendu sagement que l’homme ouvre les yeux. Il a d’ailleurs du attendre longtemps pour ça, l’intrus n’ayant pas l’air d’avoir particulièrement envie de bouger, souriant même assez connement alors qu’il est étalé sur le cadavre d’une bicyclette. Et Jude a commencé à s’impatienter. Il veut bien faire des efforts, être gentil et pas filer de coups de latte tout de suite, y’a des limites quand même. Et perso, quand un mec vient me toiser de ses quasi deux mètres pour me beugler je ne sais quel truc pas très agréable, je fais pas le malin et je me casse sans demander mon reste. Mais de toute évidence, Chogan échappe à la règle la plus élémentaire de survie, il n’a pas lu Darwin, et n’a pas pigé que si l’envie lui en prend, Jude peut le casser en deux.
Oui oui vous allez me dire que Chogan est homme de main, qu’il sait se battre, qu’il est musclé et tout, mais je vous assure qu’il ne fait pas le poids face à Jude. Jude c’est pas un guerrier, il a jamais pris de cours, mais c’est un mec qui a une puissance surhumaine. Il casse n’importe quoi du bout des doigts et franchement Chogan c’est pas un gros gabarit. Alors okay, si le monsieur commence à jouer avec les armes, il va équilibrer les chances, mais s’il joue à mains nues, il est foutu. Bref, toujours est-il que Jude a parfaitement pigé ça, et sa main le démange sévère. Il aime pas cet espèce de sourire niais qu’a l’autre, ça lui donne l’impression qu’on se fout de sa gueule et joyeusement. Il grogne légèrement, croise les bras sur sa poitrine et prend le regard le plus méprisant de sa gamme, histoire de bien foudroyer le mec encore par terre.

« T’as l’air con comme ça. Ca doit expliquer le fait que tu glandes sur mon territoire. »

Et là Jude ne sait plus quoi faire. Il hésite franchement entre laminer la tête de ce jeune imbécile, et compatir tristement à son sort de dégénéré. Non, sur le coup, il exagère pas, Chogan a vraiment une attitude bizarre. Bizarre, mais pas agressive. Et c’est bien dommage, parce que ça faciliterait les choses pour le directeur. Il a beau ne pas avoir de scrupules, il a pas forcément envie de taper sur une pauvre créature qui lui veut pas de mal et qui est sans défense. Bah oui, c’est pas bon pour la pub du cirque. Il pourrait lui demander simplement de dégager, mais l’autre a l’air muet en plus d’être idiot. Il n’a pas répondu à la première question de Jude, et c’est à parier qu’il ne répondra pas à la seconde. Alors Jude il sait plus quoi faire, il reste immobile à regarder le mec, il le reluque de haut en bas, de bas en haut, en diagonale, de dos, de face, il le trouve au passage pas trop moche, mais sans plus, et puis à force de faire bouger ses yeux, il a mal à la tête (c’est une petite nature intellectuelle, hé oui). Il finit par se laisser tomber par terre, passant du taureau surexcité à l’homme compréhensif, et il a presque envie de poser sa main sur l’épaule du jeune homme tant il se sent triste pour lui… y’a personne qui y a cru, j’espère ? Ouf. Bref, Jude trouve quand même que le gamin a un petit air d’animal drogué, il sourit toujours et c’est franchement agaçant. Le directeur finit par soupirer profondément avant fait claquer sa main sur sa cuisse (et pas sur celle de Chogan même si c’est pas l’envie qui manque).

« T’es muet ? Tu veux pas virer de là vite fait sans que je sois obligé de t’envoyer valser dans les ronces ? J’suis pas sûr que t’aimes ça. »

Si jamais il répond maintenant, Jude lui colle une baffe et lui fait sauter une dent sur deux. C’est dit.

mmChogan ne bouge pas alors que l'homme vient de se laisser tomber dans l'herbe, son regard, que l'amérindien avait finit par qualifié de fantomatique, toujours fixé sur lui. Chogan ne bouge pas plus lorsqu'il se tape la cuisse et lui pose une question. Il ne bouge toujours pas, alors que le ton devient agressif.
mmLe vent vient redonner un semblant de vie à cette scène digne d'une photographie sépia : il agite dans le dos de Chogan ses longs cheveux brun et fait voler les lacets de son sweat. L'étranger, son poitrail de cheval, ses mains comme des casseroles et ses cheveux sale est toujours au sol et peut-être doit-il se demander ce qu'il se passa alors qu'une ombre vient tinter les prunelles violettes de Chogan, les assombrissant jusqu'à ce qu'elles deviennent de la couleur de la nuit.
mmIl doit vraiment se demander ce que fait Chogan alors que, après s'être demandé s'il ne serait pas muet, il est à présent face à une statue vivante aux yeux bleu nuit et aux narines dilatées. La poitrine de Chogan se meut de plus en plus vite, son souffle devient plus rapide, il inspire et expire de plus en plus bruyamment, ses poings se crispent contre ses cuisses. Tout l'être habituellement calme qu'est l'amérindien est en train de bouillir. Si on était dans une bande dessinée, Chogan serait très certainement représenté avec de la fumée sortant des narines, de la bouche et des oreilles. Il aurait également pris une teinte encore plus rouge que ne l'est déjà sa peau et ses yeux auraient été représentés avec des veinules dilatées. Mais la réalité est moindre, et seul les yeux et les poings de Chogan montre la colère qui monte peu à peu en lui.
mmUne voix extrêmement grave monte soudainement dans les herbes folles du terrain vague.

-Je ne suis pas muet... fit soudainement Chogan Et... Rassure moi... Tu ne viens pas de m'insulter... Juste à l'instant ?!

mmL'amérindien est de retour au sol. Plus précisément, il s'est accroupi face à l'homme qui l'a dérangé dans ses méditations et dont il ne connait toujours pas l'identité.

-T'es qui d'abord pour venir me faire chier comme ça ? Je te gênais pas que je sache ! Qui je gênerais dans un endroit pareil ?! renchérit-il

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mmS'il y a bien une chose que je ne supporte pas, c'est qu'on se foute de ma gueule ! Nan mais, sérieux, il se prend pour qui ce mec là ?! C'est parce qu'il est grand et gros qu'il se permet de dire ce qu'il veut ?! Tu connais pas le respect, abrutit ?! Putain ! J'étais tranquille là ! Et v'là qu'il vient m'faire chier !

mmNan mais c'est vrai quoi ! Il croit qu'il me fait peur...? J'en ai vu des plus dur que lui... C'pas ça qui va me faire changer...

-Te fous pas de ma gueule... Je déteste ça... Et j'ai pas envie non plus de me battre avec toi. Pasque je sais ne pas faire le poids. Alors arrête de faire ton malin !

mmMais merde quoi !

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mmChogan,, Chogan, Chogan... Je me répète mais t'es vraiment un abrutit ...! T'as peur de rien, sauf du noir, mais là, tu cherche un peu trop... Vraiment !

-Dis moi plutôt qui t'es à venir me faire chier !

Invité

Cette fois, il va lui péter les dents, c’est sûr. Le mec semble s’être réveillé de son état léthargique du cochon pendu et il a daigné faire part à Jude de sa voix discordante, mal accordée et profondément irritante. Déjà ça suffit à stresser le directeur du cirque, mais en plus le ça, le damoiseau s’est carrément planté sur le chemin à prendre pour caresser Jude dans le sens du poil (et il en a, c’est pas juste une figure de style douteuse). D’accord, d’accord, le mec est pas un idiot au sens scientifique du terme, il sait parler et semble avoir plus de QI qu’une pie anémiée, mais de toute évidence, il reste quand même largement en dessous de la moyenne nationale américaine (qui n’est déjà pas, vous me l’accorderez, un modèle de satisfaction). Je récapitule : vous êtes endormi là où vous ne devriez pas l’être, le gardien des lieux vient gentiment s’enquérir de votre état, vous ne daigniez pas lui répondre, et lorsqu’il hausse la voix, vous lui explosez à la tête en l’insultant. Précisons que ledit gardien des lieux mesure un paquet de centimètres de plus que vous et qu’il pèse carrément plus lourd. Y’a personne qui a envie de rire, ou mieux, d’abréger les souffrances de ce pauvre Chogan ? Non ? Eh bah moi si.
Jude écoute le mec parler jusqu’au bout, sans bouger d’un centimètre, figé par la vague d’agressivité qui vient de naître en lui, et s’il avait été irrité en début de journée, ce n’est rien face à ce qu’il vit maintenant. Ses mains se mettent à trembler, se crispent sur les plis de son jeans et une veine palpite dangereusement sur sa tempe gauche. Ses lèvres se plissent pour retenir les mots qui seront accompagnés de coups, sa respiration se saccade dans l’espoir d’endiguer cette envie de meurtre qui l’envahit et il ferme les yeux une fraction de seconde pour ne plus avoir cet abruti dans son champ de vision. Il laisse le flot de paroles profondément dénuées d’intérêt que l’autre lui sert se tarir, et il rouvre les yeux, un petit sourire aux lèvres. Sadique le sourire, vicieux, mauvais, pervers, pile celui qui s’accorde avec l’étincelle qui brille au fond de ses yeux.

« Tiens, une étincelle vient de s’allumer dans ton regard de bovin. La classe mec. »

Jude inspire profondément, réfléchissant à la manière de faire souffrir au maximum l’animal qui s’est jeté volontairement dans ses bras, et il finit par laisser son sourire s’agrandir et se teinter de toutes les pensées sadiques qu’il a en tête, savourant cet instant. Il tapote ses poches, déniche un paquet de clopes et en cale une au coin de ses lèvres, l’allumant, avant d’expirer profondément. Il laisse le silence s’installer encore quelques secondes, nouvelle aspiration et il s’autorise alors à poursuivre le massacre verbal.

« Je suis le propriétaire des lieux. Directeur du Laudanum Circus, patron d’une dizaine d’êtres humains profondément cinglés ou effrayants physiquement. Je suis sur mon territoire. »

Ses lèvres se recourbent un peu et il prend son temps pour tirer sur sa clope, ne jetant pas le moindre regard au mec qui semble toujours l’écouter. Et il poursuit, vicieusement.

« Tu te trouves sur une zone privée, contrôlée par mes bons soins. Quant à savoir si tu déranges, je te dirais que je venais surveiller les progrès d’un employé à moi, qui a besoin d’espace pour faire son numéro. C’est un pyromane expert en explosifs. »

Jude s’étonne lui même, il est resté plutôt calme, il n’a pas encore foutu de coup dans la gueule de minet du mec et pourtant ça le démange sévère. Mais il éprouve une jouissance terrible en parlant et en démolissant l’inconnu point par point, et il ne peut se résigner à laisser sa bestialité l’emporter sur ce moment mémorable. Il sera toujours temps après…

« Tu m’épates par des déclarations brillantes. Toi ne pas faire le poids ? Vraiment ? Qui l’aurait deviné ? A part ça, t’as appris à compter jusqu’à combien mon petit ? »

Jeu, set et match.

Invité

Si quelqu’un avait eu l’idée de demander à Malachite quelle était sa zone préférée dans le cirque, il aurait sans aucun doute répondu le terrain vague. Il servait à tous les employés de zone d’entraînement, et principalement à lui qui manipulait du feu (donc danger) et des explosifs (il avait besoin de place en plus de ça). Et en ce beau jour, d’Argence avait décidé qu’il fallait qu’il se dérouille un peu après la raclée phénoménale que lui avait foutu le directeur du Laudanum. Il avait encore un peu mal dans la mâchoire, ce qui était tout à fait normal vu la série de pains qu’il avait mangé joyeusement, et ça le gênait pour cracher du feu. Une gêne qui pouvait s’avérer franchement dangereuse s’il ne s’y habituait pas, et comme il avait compris que Jude le voulait de nouveau sur scène dans peu de temps, il allait s’entraîner. Comme quoi les suites logiques ont également cours dans l’esprit tordu de Malachite, c’est juste que c’est pas souvent.
Il avait donc en main une bouteille d’alcool inflammable de mauvaise qualité, celui dont il se servait pour cracher du feu en niquant joyeusement ses muqueuses buccales et ses poumons, un briquet, et une torche pas encore allumée. Dans sa poche, il y avait quelques mignons explosifs confectionnés par ses soins, et qui constituaient la vraie raison de sa venue sur le terrain vague. Concentré qu’il était sur les futures explosions qui ébranleraient le cirque, le cracheur de feu ne vit pas la silhouette pourtant massive de Jude plantée non loin de lui dans le terrain vague, pas plus que celle de l’homme plus ou moins effondré à ses pieds. Les aurait-il vu qu’il s’en foutu complètement ; Malachite n’était pas exactement un garçon curieux.
Il sortit de sa poche une petite charge d’explosifs, avec aussi peu de précaution que s’il avait été question d’un objet en titane, la tripotant du bout de ses longs doigts, un bout de langue pointant entre ses dents, témoin de sa concentration. Il n’avait toujours pas vu Jude et l’inconnu, et il était probable qu’ils ne l’aient pas vu non plus, parce qu’il ne faisait absolument pas de bruit … Pour l’instant.
Quelques secondes plus tard, on ne pouvait pas louper la présence du cracheur de feu, à moins d’être sourd. Une détonation formidable se produisit, résultat de la mise à feu de la petite charge d’explosif, et Mala, qui l’avait d’abord lancée au loin, se jeta au sol avec un petit glapissement ravi. Il roula sur l’herbe défraîchie et boueuse du terrain vague, se foutant totalement de savoir qu’il était en train de ruiner un slim déjà trop grand pour lui, qui tombait trop bas sur ses hanches, et ramena une mèche de cheveux en arrière d’un geste impatienté, laissant une traînée de boue sur son front.
C’est à ce moment-là qu’il les repéra, silhouettes tendues vers lui dans une attitude accusatrice. Il n’eut pas la décence de déglutir ou de se sentir coupable, et se releva rapidement en tirant le bas de son t-shirt pour qu’il couvre son ventre plat. D’un pas silencieux il s’approcha d’eux, jaugeant du regard Chogan toujours au sol en tournant vaguement autour de lui, efflanqué et sale dans ses fringues pas adaptées à sa taille.
Le regard sombre ourlé de longs cils se releva sur Jude, interrogatif.

« C’est qui lui ? »

Comme d’habitude, aucune peur ne se lisait dans l’attitude de Malachite. Il était à peu près certain de prendre une claque sur le museau pour avoir joué aux explosifs alors que Jude n’était pas loin, mais il ne la craignait pas. Intrigué par l’inconnu présent dans le terrain vague, il ne se résoudrait pourtant pas à lui parler, se contentant de le dévisager d’un regard curieux et méfiant, prêt à lui foutre un coup de pied de sa botte trop lourde s’il se relevait un peu trop rapidement.

« ... ton regard de bovin... le propriétaire des lieux... mon territoire... une zone privée...»

mmAurait-il... Manqué le coche...? Fait une erreur de jugement,d'appréciation ? Ou comme toujours, a-t-il été un tantinet trop impulsif...? Il ne serait pas à douté que ce fut le cas et Chogan lui-même, le pensait.
mmOn le disait discret, distrait. Et c'était le cas. Malgré sa haute stature, il n'était pas facilement repérable, même dans une foule. Sa tête plus proche des nuages le rendait aussi plus proche de la lune, des étoiles et leurs métaphores respectives... Mais, lorsqu'il s'agissait de sa propre personne, où d'une autre, quelle soit-elle, à partir du moment où elle lui était chère, il redescendait immédiatement de son nuage et son esprit, trop brutalement demandé avait du mal à se coordonner avec le reste du corps... Autrement dit, il parlait sans réfléchir véritablement à la situation et roulait des yeux... Ses grands yeux violets qui habituellement font peur mais qui apparemment, n'impressionnaient même pas l'homme face à lui... Et pourtant, c'était pas faute de l'avoir regarder des pieds à la tête avant de s'être laissé tombé dans l'herbe...
mmMais ça n'était pas le plus important pour l'instant. Parce qu'à cet instant précis, les paroles de... Du directeur du chapiteau miteux devant lequel l'amérindien était passé sans voir. Celui que tout le monde connaissait dans la ville comme "The strongest Man on Earth"... Chogan aussi le connaissait, enfin de nom. Comme tous à la Big Apple II... Enfin, le bouche à oreille quoi... Et notre bel amérindien, du haut de son mètre quarte-vingt-dix se sentait soudainement tout petit riquiqui...
mmIl zappa la partie où l'homme le plus fort du monde parlait de son cracheur de feu et le disque dérailla directement sur la dernière phrase. Dernière phrase qui lui rappela sa première, le coup du "regarde de bovin" était mal passé... Il n'était pas du tout passé en faite...

« Tu m’épates par des déclarations brillantes. Toi ne pas faire le poids ? Vraiment ? Qui l’aurait deviné ? A part ça, t’as appris à compter jusqu’à combien mon petit ? »

mmEt le coup du petit, bon ok, il était légèrement plus petit que son vis à vis... Mais ça n'était pas parce qu'on était grand qu'il fallait se permettre de toiser ainsi une personne. Et la mégalomanie, en tout cas c'est ce que Chogan ressentait en entendant parler l'homme, était quelque chose qu'il ne supportait pas... Il était grand lui aussi, se permettait-il de parler de la sorte aux gens ? A des étrangers qui plus est...? Bon, d'accord, Chogan était sur le terrain du mec, 1 - 0 pour le taureau... Mais bon... Et puis il me semble avoir assez répéter que CHogan n'aime pas trop qu'on se moque de lui...

-Le petit il sait à mon avis compter plus loin que toi... Monsieur Muscle...!

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mmS'il croit que je vais me laisser marcher sur les pieds simplement parce que je me suis allongé sur son... Dans sa porcherie plutôt, il se fourre le doigt dans l'œil ! Et bien profond ! Histoire que ça remue sa cervelle et non ses muscles... Bordel mais c'est quoi ce boucan derrière...

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mmMais Chogan n'eut pas le temps de se retourner, la personne qui avait fait exploser son pétard était à leur niveau, demandant évidement, qui était donc Chogan... Et ne se privant pas pour le renifler !

-Et toi t'es qui ? fit l'amérindien avec amertume

[merci Gab ! ta venue m'a débloquée je savais plus quoi rèp à Angie alors que je devais m'y attendre lol]

Invité

Ce qu’il y avait de bien dans la vie d’un Jude, c’est qu’il en apprenait chaque jour un peu plus sur lui. Et la leçon d’aujourd’hui était : la pitié.

Lorsque le damoiseau-qui-n’avait-toujours-pas-donné-son-nom s’était fendu d’une vanne digne d’un gamin de CP, Jude avait éclaté de rire, trop hilare pour s’énerver, et Chogan avait évité la première baffe. Annoncer à Jude qu’il ne savait pas compter, c’était sûrement la chose la plus stupide à dire parce que, avec cogner bien sûr, c’était l’unique chose qu’il savait faire. Il avait beau être particulièrement limité, il était doué en maths, ça ne s’expliquait pas, c’était comme ça, un point c’est tout. Jamais une erreur dans ses comptes, une faculté à faire des calculs de tête assez extraordinaire, une facilité pour tout ce qui traitait des taux de remboursements et de prêts, et c’était sûrement pour ça qu’il aimait autant l’argent. Jude aurait été prêt à parier son bras droit qu’il savait mieux compter que le rigolo qui lui faisait face, et rien que le fait qu’on puisse en douter le plongeait dans un fou rire hystérique. Il n’avait pas encore réussi à reprendre son calme quand le bombardement éclata, détonation franchement familière quand on vivait avec un expert en explosifs pyromane, et les réflexes de Jude prirent le pas sur son accès de gaieté. Il plongea vers la terre ferme, regroupant ses membres contre son corps, histoire d’éviter de se faire arracher une jambe, et plaqua ses mains sur sa tête, digne d’un soldat de la première guerre mondiale. Il connaissait Mala, il savait avec quel plaisir il balançait ses bombes artisanales sans viser, et chacun dans le cirque avait suivi un entrainement de survie en cas de coup d’éclat du gamin. Il attendit quelques secondes en priant pour que Mala ne remette pas ça avant qu’il ait pu lui claquer le museau, et finit par se relever avec un grand sourire aux lèvres.
Le cracheur de feu était bien présent, à quelques pas de lui, et Jude le regarda approcher avec une expression de plus en plus sadique au visage. Lorsque le gamin fut à ses côtés, Jude effectua quelques allers-retours entre le visage de son employé et celui de l’intrus, profondément satisfait par la tournure que prenaient les choses. C’est là qu’intervient la compassion. Vous vous rendez sûrement pas compte, mais se retrouver coincé entre un Malachite et un Jude passablement excités, c’était vraiment pas bon signe. Déjà pris à part, c’était un jeu dangereux, on pouvait finir cramé vif, ou bouffé tout cru, mais lorsque l’on chopait le duo, on était assuré de finir en barbecue (Mala dans le rôle de la cuisson et Jude dans celui du goûteur évident). Et c’est donc là que Jude ressentait une pointe de pitié pour le pauvre Chogan qui, au final, n’avait pas fait grand chose. Personne ne méritait un tel sort.
Le directeur finit par faire un pas vers son employé, lui colla une petite tape (très légère !) sur l’épaule et fronça les sourcils, prenant un air faussement furieux.

« Fais un peu gaffe quand tu balances tes trucs. Ou alors, vise bien. »

Jude coula alors un regard empli de sous-entendus vers Chogan, montrant ses dents de carnassier alors que son sourire s’étirait, et il posa une main protectrice sur son cracheur de feu. Hors de question de jouer au jeu du plus fort aujourd’hui, l’ennemi était parmi eux, en joue soldats, crevez moi ce chien, FEU ! FEU ! FEU ! (Et là je me fais rire bêtement). Jude secoua de l’autre main ses fringues pleines de terre, rejetant une mèche de cheveux en arrière, la lissant pour bien la faire tenir avec la crasse et se racla la gorge, avant d’allumer une autre clope.

« C’est Malachite d’Argence, mon cracheur de feu. »

Jude avait lourdement insisté sur le terme possessif, croisant très fort les doigts pour que Mala ne recommence pas ses conneries de « T’es pas mon chef ! », et il plissa un peu plus les yeux, avant d’incliner le visage en direction de son employé. Il tendit un doigt vers Chogan, afin que le cracheur de feu ne se méprenne pas sur ses paroles (oui maintenant, il prenait des pincettes), et lâcha d’une voix rauque :

« Un ennemi. »

Jude ou comment simplifier les choses en les ramenant à une basse matérialité animale.

Invité

Malachite avait beau avoir une capacité cognitive plutôt réduite et qui fonctionnait carrément à l’inverse de celle des autres humains, il compensait ça avec une faculté de méfiance ultra développée. Passer des années à éviter de terminer au menu du repas de la journée faisait souvent cet effet-là, à ce qu’il paraissait, et c’est pour ça que le cracheur de feu regarda d’un air bizarre et concentré Jude quand celui-ci lui effleura mollement l’épaule. Le directeur l’avait plutôt habitué à une patience extrêmement réduite et une puissance de coup inversement proportionnelle, d’où l’étonnement à ne recevoir que cette petite claque qui ne rimait à rien sur l’épaule. Pour toute réponse à l’énième avertissement qu’il reçut, il se contenta de grincer des dents, ce qui ne voulait rien dire de spécial, même une fois traduit du langage corporel de Malachite à celui des autres humains.
Il baissa son regard sombre vers l’homme étalé au sol, l’expression peu intéressée, ne bronchant pas quand il lui demanda son identité. Malachite avait une faculté formidable à ignorer royalement la plupart des questions qu’on lui posait ; il faisait tout simplement comme s’il ne les entendait pas, et obtenir une réponse de lui pouvait s’avérer être une véritable épreuve. Il ne broncha pas plus quand Jude répondit à sa place, lui jetant tout juste un coup d’œil en coin lorsqu’il brailla son droit de propriété sur sa personne. Le manque de réaction du cracheur de feu était tout simplement affligeant, il se contenta de cracher par terre, évitant tout de même de le faire sur Chogan. Par simple réflexe d’éviter les choses qui bougent, cracher sur les objets immobiles était toujours bien plus sécurisant.
Quand Jude tendit le doigt vers Chogan, ce fut limite si Malachite ne fixa pas son doigt, le regard à moitié perdu dans le vague, les mains appuyées sur les hanches sans paraître se soucier de remonter son jeans qui tombait un peu trop bas. Il pinça les lèvres en désignant le jeune homme toujours au sol d’un coup de menton.

« J’en fais quoi ? J’lui balance de l’explosif dessus et j’dirais que j’ai rien vu ? … On peut aussi le donner aux tigres, mais ils ont les mâchoires qui fatiguent. »

Et tout le monde s’en doute certainement, mais Malachite n’a absolument aucun sens de l’humour, sa vie c’est pas au sérieux qu’il la prend, mais au tragique. D’une main, il tenta d’ordonner un peu ses mèches de cheveux ; un passe-temps auquel il s’adonnait très souvent avec des résultats plus que médiocres. Environ quinze secondes plus tard, il était en train d’enrouler une mèche de cheveux noirs autour de ses doigts, pensivement, le regard déjà réfugié dans le vide, qui semblait être son élément d’origine (et son terrain de prédilection).

« On peut aussi l’enfermer dans une benne à ordures, j’trouve ça marrant. »

Sa phrase n’était pas très intelligible, parce qu’en même temps qu’il parlait, il se mordait les ongles méthodiquement, avant de les essuyer sur son jeans boueux, et de recommencer. Ça pouvait être interprété comme un tic nerveux, mais en connaissant un minimum Malachite, on apprenait très vite que la nervosité était un état d’esprit qui lui échappait complètement … Comme tant d’autres choses.
Mais quand Chogan fit un mouvement innocent pour se relever, le pied gauche du cracheur de feu prit violemment contact avec ses côtes, et Mala contempla Chogan à nouveau écroulé au sol, très satisfait de lui.

mmChogan écoutait d'un œil rageur les deux hommes parler.
mmLes menaces lancées par le plus jeune ne lui faisait absolument pas peur. Elle le faisait même rire. Comme un gamin de sa sorte pouvait-il sortir des débilités pareilles...? En plus, s'attaquer à un membre des Six Feet Under, aussi bas dans l'échelle soit-il, n'était franchement pas une bonne idée... Il pouvait y avoir des répercutions plutôt mauvaise pour ne pas dire atroces...

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mmLa benne à ordure, bin voyons... T'as encore d'autres idées de ce genre...? C'est pas très recherché...
mmLe coup des tigres c'était déjà mieux ! Mais la benne à ordure c'est vraiment le dernier recours franchement... Mais, mon coco... Les plaisanteries les plus courtes sont les meilleurs...

-Y'a pas intérêt, à ce que tu refasse un coup pareil le nain... C'est clair ?

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mmIl est rare, extrêmement rare que Chogan se mette en colère. Mais puisque, pour une raison obscure que l'amérindien ne prendra pas le temps de chercher, l'étrange lueur qui palpite dans ses yeux ne fait absolument pas peur aux deux abrutis devant lui, il faut bien qu'il agisse... Et pointer son flingue sur le petit merdeux qui vient de lui faire un croche-patte alors qu'il tentait de se relever histoire de regarder comme il se doit ces deux imbéciles qui se permettent de l'insulter sous prétexte qu'il est sur leur, porcherie, semble être devenu l'unique solution pour que ces deux rigolo le respectent...
mmLe seul petit détail emmerdant, est qu'il na qu'un seul pistolet. Et si le Taureau le prend par surprise, il se peut très certainement qu'il n'ai pas le temps de tirer et qu'il se fasse maitriser sans peine par ce géant testostéroné.
mmIl va devoir la jouer fine... Ces deux hommes ont tout de même assez de jugeote pour l'écouter parler ?

-Bon, sérieusement les gars, j'ai pas l'intention de vous tuer. Je serais pas payer pour et surtout, j'aurais plus la conscience tranquille. fit Chogan tout en s'époussetant le pantalon Mais si y'a que ça pour vous faire fermer vos gueules et m'écouter, et bien j'agit.

mmLes beaux yeux améthystes de Chogan avait perdu de leur animosité. Ils était redevenu les placides yeux rêveurs qui lui donnait sa réputation de planeur. Par contre, la main tenant le pistolet avait raffermit sa prise. Son bras était bien droit, il pointait le cracheur de feu mais son regard allait et venait, ne se posant jamais sur l'un des deux hommes.

-Désolé, de m'être endormit dans votre porcherie. Ce ne se reproduira pas si c'est ce que vous voulez entendre messieurs... Mais ça n'était pas une raison pour se fouttre ouvertement de ma gueule. Et je m'adresse surtout à toi, le nain... C'est bien beau de jouer avec le feu, mais un jour il va te brûler... Continue d'amuser la galerie avec tes tours mais vient pas faire ton intéressant ok... Moi aussi j'aime les joujoux de ce genre. Plus particulièrement les armes à feu... Je te demande pas d'excuses. Mais viens pas trop me chercher des noises à l'avenir... Ok mon chou...? faisant un sourire entendu au cracheur de feu, son regard revint sur Jude Guelfe Et toi, le Taureau... C'est gentil de ne pas m'avoir réveillé en me tapant dessus... T'as peut-être que des muscles mais j'ai force de constater, que tu es un homme intègre...

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mmBon... Et bien j'espère qu'après tout ce speech, ils vont me laisser tranquille... Je déteste qu'on se foute de ma gueule mais me rabaissé n'est pas du tout un problème pour moi... Enfin...

-J'espère que vous avez compris messieurs... Au plaisir de ne jamais vous revoir !

mmEt sans peur de paraître débile avec des réplique à la noix en plus... Avec ça s'ils ont pas compris que j'en ai rien à battre de leur gueule...
mmEnfin bon... Finit la sieste... Je repars la tête haute... Et le gun à l'abris dans mon calbute... je sais même pas s'il j'avais des balles en plus... Faudrait que je passe au dépot, et qu'ils me fasse une révision aussi, pour le peu que je m'en sers, il doit être rouillé...

Invité

De nos jours les gens n’ont plus d’instinct de survie. Enfin, ce n’est pas vraiment leur faute, on ne leur apprend pas à le conserver. Si Jude avait été élu ~~dictateur~~ président, sa première loi aurait été d’apprendre aux gamins qu’il faut se méfier des gens comme lui. Normalement, on s’en rendait compte plutôt rapidement, mais il existait des gens qui échappaient à cette règle. Certes Chogan avait pigé qu’il devait prendre des pincettes avec lui, et d’ailleurs il s’en était aussitôt pris à Mala, que l’on jugeait plus facilement d’inoffensif, mais il continuait de commettre des bourdes. Grave erreur aurait dit le directeur, le cracheur de feu avait été celui qui lui avait mis le plus cher. Avec sa silhouette de cigarette light, il avait l’air facile à casser en deux, mais il était insensible à la douleur. Jude n’avait réussi à le stopper qu’en l’écrasant de tout son poids, ce qui n’est pas peu dire. Puis en plus de ça, il avait quelques coups vicieux et était réellement dangereux quand il avait des explosifs sur lui. Ce qui signifiait tout le temps. Par contre, Malachite était parfaitement inconscient. Et Jude, en bon directeur qu’il était, s’était quand même pris d’une « affection » particulière pour le gamin. D’accord il l’énervait très vite et très fort, mais il n’avait aucune envie qu’il lui arrive quelque chose (que lui-même n’avait pas provoqué) et par conséquent, il se sentait dans l’obligation de le protéger.
Quand Chogan pointa l’arme sur Malachite, le sang de Jude ne fit qu’un tour avant de se refroidir. Si ça n’avait tenu qu’à lui, il aurait explosé la tête de l’homme, mais il savait aussi qu’il fallait la jouer fine. Jude était à l’épreuve des balles, ça ne le dérangeait pas une seule seconde de se faire tirer dessus, du moment qu’il rendait les coups, mais Mala claquerait assez vite d’une balle. Okay, Jude on respire et on se fait pas de mouvement brusque. Mais la colère était là, très forte, violente même, il avait l’impression que Chogan ne pourrait pas louper toute l’animosité qui suintait du directeur. Menacer son employé… vaste connerie.

Toi t’aurais du t’en prendre à moi…

« Malachite tu dégages. IMMÉDIATEMENT. »

Jude n’avait pas réellement fait gaffe à ce que disait Chogan, trop concentré à contenir sa colère et à évaluer le bond qu’il devrait faire pour se placer devant son gamin (quand on est aussi gros que lui… y’a moyen que ça complique), mais il avait bien compris que l’étranger était resté dans les limites du politiquement correct. En d’autres termes, pas d’agression inutile qui aurait pu ouvrir les vannes de Jude. Bien joué, mec.
Là où par contre la surprise fut réelle, ce fut quand Chogan tourna les talons après avoir rangé son arme. Suicidaire ? Qui lui avait appris à faire de telles conneries ? Sincèrement, quand on vient de menacer deux mecs pas forcément très impressionnables avec une arme à feu, on ne leur montre pas son dos, sans protection. Jude lança un nouveau regard au cracheur de feu, accompagné d’un signe de menton, et ô miracle Malachite obéit. Oui bon, c’était sûrement parce qu’il se faisait chier et n’avait aucune envie de rester plutôt que parce qu’il obéissait à Jude, mais bon, ça fait toujours plaisir de le croire.
Trois enjambées plus tard, Jude posait sa main sur l’épaule de Chogan, fermement sans être trop agressif, et il l’obligea à s’arrêter. Le regard étrangement fixe, Jude contrôlait ses pulsions, se forçant à ne pas l’étriper sans attendre.

« Ton chargeur est mal enclenché. Tu n’aurais rien tiré. Ca c’était la première leçon. La seconde, c’est que tu n’aurais pas du menacer Malachite. Réfléchis deux secondes, tu l’aurais descendu et après c’est moi qui t’aurais tué. Mauvais calcul, c’était l’inverse qu’il fallait faire. Me descendre et prier pour que Mala ne pige pas ton geste. »

Jude inspira profondément. Ne pas le cogner. Si jamais il cédait à sa colère, il allait le tuer. Il ne devait pas.

« T’es encore jeune mon gars, alors évite de te foutre dans des emmerdes de ce genre. Et la prochaine fois que tu veux venir au cirque, passe par la porte d’entrée. »

Son poing se ferma en une boule, et Jude l’enfonça dans sa poche. Respirer. Avant il n’aurait pas eu de scrupules à cogner, mais là son cirque était quand même en jeu. Tuer quelqu’un oui, mais pas sur son territoire. Après les flics poseraient des questions et Jude n’avait pas envie qu’ils fouinent ici. Et puis… Il doutait fort que ce mec revienne foutre les pieds ici.

« Ne m’oublie pas, moi j’ai très bonne mémoire. »

mmChogan était redevenu égal à lui-même.
mmAlors qu'il s'éloignait lentement mais d'un pas décidé du lieu où il se tenait quelques instant plus tôt une arme à la main, il se fit arrêter, dans sa marche et sa contemplation d'un avion traversant le ciel, par une main bourrue mais ni violente, ni brusque.
mmSe retournant pour voir celui qui l'avait arrêté, il ne fut pas surprit de devoir lever ses yeux violets pour regarder comme il se doit la personne qui ce prétend être l'homme le plus fort du monde.

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mm... J'ai pas été assez clair ou je ne me suis pas trompé dans mes calculs et il a vraiment que des muscles à la place du cerveau...? Il cherche vraiment les ennuis ? Il aime ça peut-être ?
mmMoi qui était bien décidé à rentrer tranquillement chez moi, c'est pas encore gagné... Enfin, écoutons-le au moins.

-Ton chargeur est mal enclenché Ça je le savais... Mais si tu m'avais écouté, tu aurais sut que je n'avais aucune intention de titrer... Ni sur toi, ni sur ton... Mala... Ca c’était la première leçon. Bien professeur... La seconde, c’est que tu n’aurais pas du menacer Malachite. Réfléchis deux secondes, tu l’aurais descendu et après c’est moi qui t’aurais tué. Mauvais calcul, c’était l’inverse qu’il fallait faire. Me descendre et prier pour que Mala ne pige pas ton geste.Je n'avais aucunement l'intention de vous descendre, je me répète...T’es encore jeune mon gars, alors évite de te foutre dans des emmerdes de ce genre. Et la prochaine fois que tu veux venir au cirque, passe par la porte d’entrée. Ne m’oublie pas, moi j’ai très bonne mémoire. Oh, mais que de gentilles paroles... Comment dois-je t'appeler, Papa ou professeur ?

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mmAyant croiser ses bras sur sa poitrine, Chogan et ses yeux violets toisait avec une certaine indifférence l'homme toujours face à lui, qui avait enfouit son poing serré dans une de ses poches.
mmChogan n'était pas dupe, il avait bien sentit que l'homme se faisait violence pour ne pas engager un combat, au corps à corps certainement. Mais, l'amérindien n'avait pas tirer un peu plus tôt. Il n'avait jamais eut l'intention de tuer qui que se soit et ça n'était pas maintenant que ça allait changer. Alors, s'il ne faisait aucun geste brusque, ou portant à confusion, il ne risquait, en principe, pas grand chose... Sauf si ce Jude Guelfe enguageait lui-même les hostilité... Mais, quelque chose disait à Chogan que l'homme ne souhaitait pas non plus spécialement se battre...
mmIl n'était qu'un de ces hommes dont le cerveau reptilien, celui des instincts, a plus d'activité que la normal. Pour ne pas dire, surpassait l'activité du cortex cérébrale... Il cherchait donc simplement à protéger son territoire, et sa meute... Si on pouvait appeler ça une meute... Un nain cracheur de feu...
mmChogan n'a vraiment pas pour habitude de parler ainsi alors qu'il ne connait absolument pas ce " Mala "... Ni même Jude en vérité, mais, il ne supporte pas qu'on se moque de lui... C'est dans ces moment là que son cerveau reptilen à lui entre en activité. Et il reconnait bien volontiers que là, si le géant avait réagit lorsqu'il avait pointé son arme sur le mioche, il n'aurait plus été de ce monde à cet instant... Mais, il avait simplement jugé trop vite et, derrière la couche de muscle et le cerveau reptilien un peu trop développé que la normal, se cachait un homme avec une intelligence normale.
mmChogan lâcha un soupir avant de prendre la parole, à peine quelque secondes après que Jude ait lui-même finit de parler, un poing dans sa poche.

-Dans un certain sens, je dois avouer que tu as raison... fit Chogan d'un ton tout à fait naturel Mais tu n'a absolument pas écouté ce que j'ai dis...ajouta-t-il un peu plus médisant Ce flingue... Je ne l'ai sortit que pour vous faire fermer vos gueules... J'en avais marre, je voulais me barrer et retourner à mes occupations... Je me suis excuser pour avoir pénétrer chez toi et dis que ça n'arriverais plus. Ne m'oublie pas si ça te chante, mais crois-moi bien que je ne reviendrais pas ici... C'est dommage pourtant, t'avais pas l'air si gêné que ça de ma présence avant que ton cracheur de feu n'arrive. On aurait pu parler entre adultes responsables. J'étais en tord, ne le savais pas mais était sans conteste prêt à l'accepter... termina-t-il d'une façon tout à fait normal et sans reproches Si tu ne m'avait pas insulté, peut-être qu'on en serait pas là-non plus. finit-il pour de bon avant de sortir une cigarette, 'allumer et commencer à tourner les talons après un bref salut de la tête

Invité

« On ne me ferme pas la gueule. »

Encore une fois ce n’était pas une tentative d’agression – Jude ne cherchait vraiment plus le combat – mais une simple constatation. L’idée qu’on puisse lui fermer sa gueule lui paraissait incongrue, tout simplement parce qu’il ne voyait pas comment. L’instinct de survie de Jude avait beau exister, il partait du principe que c’était bon pour les autres et pas pour lui. Une peur ? La fermeture de son cirque. Point. Ni les flingues, ni les armes blanches ne pouvait l’effrayer. Tout simplement parce qu’il savait qu’il avait de quoi riposter compte double voire triple. Et puis complexe de supériorité, tout ça, il était persuadé d’être immortel. Tel un blaireau au réveil.
Chogan disait beaucoup de choses illogiques, mais le directeur ne trouvait pas son attitude si bête que ça au final. Après tout, il avait eu quelques dérapages, mais il avait rapidement pigé qui était le mâle dominant ici. Certes, il ne se soumettait pas en demandant pardon et en pleurant toutes les larmes de son corps – Jude aurait trouvé ça parfaitement indécent – mais il agissait vraiment en adulte responsable. Il admettait avoir été en tort, et il avouait s'être excusé. Bon point pour toi mon gars. Et puis bon, il fallait dire quand même qu’il n’avait pas jeté la première pierre. Bref, Jude ne garderait pas trop de rancœur envers ce gamin sur ce point-là. Par contre ce que Jude ne pouvait digérer c’était bien le coup de la menace au flingue. Certes, Chogan lui disait que c’était juste pour impressionner et non pas pour agir, mais l’idée de base était quand même là. On ne sort pas un flingue uniquement dans le but de faire peur. Une fois qu’on l’a en main, si vraiment l’occasion s’en présente, on tire. Réflexe humain.
Et puis soyons fous, mais Jude ne s’imaginait pas vivre sans Mala. Non, arrêtez de glousser comme des furies, mais Jude avait une capacité de projection dans l’avenir assez limitée. Le cracheur de feu était sa tête d’affiche, celui qui faisait le plus d’entrées, tout simplement parce qu’il était meilleur que tous les autres pyromanes ayant jamais existé, et le géant ne voulait pas perdre une telle somme d’argent. Et puis, il y avait une raison plus compliquée que ça : Malachite occupait les journées de Jude. Toujours à faire une connerie, toujours à être agressif et à montrer des dents, le directeur savait pourtant qu’il pouvait « relativement » compter sur lui. Bien plus que sur les autres employés, car Malachite ne connaissait pas tous les sentiments humains. Il n’éprouvait pas le besoin de parler à tout va, de donner son avis sur tout, d’argumenter quinze ans sur une couleur de costume, et quand Jude lui donnait un ordre et qu’il obéissait, il faisait les choses bien. De même, il avait confiance dans les jugements du gamin, tout simplement parce que Mala ne voyait pas l’intérêt d’être hypocrite. Et ça c’était bien. Non, tout compte fait, Malachite faisait profondément chier Jude, mais Jude le considérait comme sa chose et commençait même à éprouver une affection étrange pour ce gamin. Donc, on ne menaçait pas ses objets.

« Navré pour l’accueil si désagréable. On va dire que c’était un malentendu, qui aurait effectivement pu être réglé à l’amiable. »

Jude observa Chogan allumer une clope et tourner les talons. Une gambas ça ne rattrape pas deux fois la même personne, c’est contraire à la règle numéro trois du clan des crustacés. Alors il le laisserait partir, comme ça, sans rien faire. Parce que le type s’était excusé, que Jude aussi, et que ni l’un ni l’autre ne voulait voir du sang aujourd’hui.

« Bonne journée. »

Et le directeur du Laudanum Circus se colla une violente baffe sur le cou en sentant la piqûre d’un insecte.